Dinidinika ambany tafotrano niaraka tamin’i pasitera Rakotoharintsifa
« Etre digne de mes ancêtres »
Cette nécessité de faire le tri plonge ses racines dans le creuset de l’Evangile et l’injonction faite aux chrétiens de rejeter les idoles qui aliènent. Celles-là existent dans la tradition. « En tant que pasteur, je suis tenu de discerner le cultuel du culturel. On peut s’approprier des façons de chanter, d’invoquer, héritées du passé. De même, dans le champ culturel, est-il possible de retenir des rites de passage à moderniser. En revanche, certaines pratiques sont devenues caduques, comme celle du retournement des morts. Pour moi, honorer mes ancêtres, ce n’est pas changer leurs linceuls, c’est être digne d’eux dans ma vie, être respectable. »
Au cœur de ces pratiques si spectaculaires et « exotiques » aux yeux de l’étranger, se joue, selon lui, quelque chose de bien plus fondamental. Cette attention si forte portée aux ancêtres traduit en fait l’angoisse des vivants et une infinie quête d’identité, une volonté de réussite sociale à travers la bénédiction tant recherchée des aïeux. « Les Malgaches sont peu sûrs d’eux-mêmes, résume-t-il. Pour moi, le vêtement social que nous devons revêtir est celui du Christ », dit celui qui a fermement décidé avec sa femme, ingénieur, de ne jamais assister à des retournements de morts. Même pour des proches, des amis. « Bien sûr, je ne suis pas compris. Mais on ne peut pas indéfiniment discourir dans l’abstrait, il faut être cohérent dans ses actes. » La détermination pointe dans la voix de Touvo, pas la peur. Son travail est apprécié. Lui gêne. Il l’assume, tel un prophète de son temps.